En septembre 2021, Apple a introduit la protection de la confidentialité dans Mail (en anglais « Apple Mail Privacy Protection », que nous abrégerons par AMPP), une nouvelle fonctionnalité de l’app Mail native, qui aide les utilisateurs à empêcher les expéditeurs de suivre leur comportement d’ouverture.
Dans cet article, nous résumons ce que nous avons pu constater dans les données jusqu’à présent suite à l’introduction de l’AMPP. En outre, nous faisons la lumière sur notre approche permettant d’identifier les ouvertures AMPP, comment les taux d’ouverture des emails ont évolué, et ce que nous avons observé dans les taux de clics et d’ouverture des contacts utilisant cette fonctionnalité de confidentialité.
Comment nous identifions les ouvertures AMPP
L’ouverture d’un email est généralement suivie par des pixels espions : il s’agit de petites images qui sont téléchargées depuis les serveurs de l’expéditeur au moment où l’email est ouvert. Lorsque l’AMPP est activée, Apple précharge les emails des utilisateurs de l’app Mail et, ce faisant, télécharge également les pixels espions. Les marketeurs ne sont notifiés que lorsque le préchargement a lieu, mais ces informations ne peuvent être utilisées comme un indicateur du véritable comportement de l’utilisateur. En outre, Apple achemine également les emails via des serveurs proxy, ce qui masque l’adresse IP et le type d’appareil à partir desquels l’email a été ouvert.
Nous utilisons habituellement les informations disponibles dans l’en-tête de requête user-agent pour identifier le système d’exploitation, l’appareil et le client email utilisés pour ouvrir l’email. Cependant, lorsqu’un email est ouvert à partir d’un appareil sur lequel l’AMPP est activée, l’en-tête de requête est masqué, ne fournissant aucune information sur l’appareil de l’utilisateur.
À notre connaissance, il est impossible d’identifier les utilisateurs de l’AMPP avec une certitude absolue. Cependant, nous avons supposé que la grande majorité des ouvertures avec un en-tête de requête masqué résultent de l’AMPP. Cette hypothèse est confirmée par les tests que nous avons effectués sur des appareils iOS 15, et nous classons donc les ouvertures masquées comme des ouvertures AMPP. Par conséquent, en analysant les tendances de la proportion de ces ouvertures, nous pouvons avoir une bonne compréhension de l’effet de cette nouvelle fonctionnalité de confidentialité.
Comment les ouvertures ont évolué
La figure 1 montre les taux d’ouverture mensuels entre le 1er août et le 28 février. La figure montre une augmentation significative des taux d’ouverture à partir de la fin du mois de septembre. À la fin de l’année 2021, le taux d’ouverture moyen a augmenté de 10 points de pourcentage pour atteindre un peu plus de 25 %.
Quel pourrait être le moteur de cette augmentation constante des taux d’ouverture ? Pour faire la lumière sur ce point, nous pouvons examiner la figure 2, qui montre le nombre d’ouvertures d’emails dans le temps, ventilées par clients email, par rapport à septembre 2021. Nous pouvons constater que les ouvertures dans la plupart des catégories sont globalement stagnantes, à l’exception des zones jaune (Apple native) et verte (AMPP). Deux changements importants peuvent être mis en évidence :
- Nous voyons comment les utilisateurs d’Apple se sont adaptés au dernier système d’exploitation. La zone jaune est lentement engloutie par la verte, qui est le résultat de la mise à jour du système d’exploitation par les utilisateurs.
- L’expansion de la zone verte montre que le nombre absolu d’ouvertures AMPP a augmenté de manière significative depuis l’introduction.
Comme mentionné précédemment, les emails entrants des utilisateurs de l’AMPP sont automatiquement préchargés par Apple. Il en résulte un grand nombre d’ouvertures générées par une machine, par opposition aux ouvertures générées par un humain. Nous considérons que ces ouvertures sont « fausses » et que leur fréquence d’apparition est beaucoup plus élevée que ce que le comportement des utilisateurs laisserait supposer. Malheureusement, il n’y a pas d’informations publiques disponibles concernant le mécanisme exact de préchargement, mais l’examen des anciens taux d’ouverture nous permet de tirer des conclusions quant à la validité de ces ouvertures.
Comment rapprocher l’augmentation des taux d’ouverture et la flambée du nombre d’ouvertures AMPP ?
La figure 3 montre le taux d’ouverture moyen des utilisateurs de l’AMPP par rapport à tous les non utilisateurs de l’AMPP entre le 1er août 2021 et le 28 février 2022. Nous marquons les contacts comme étant des utilisateurs de l’AMPP si la grande majorité de leurs emails ont été ouverts dans les deux semaines suivant la semaine de la sortie d’iOS15 (semaine 38) depuis un appareil sur lequel l’AMPP est activée. Les résultats indiquent clairement que lorsque l’AMPP est activée, le pixel espion de presque tous les emails a été téléchargé, ce qui se traduit par un taux d’ouverture élevé. Cela implique que la flambée du taux d’ouverture est due à de « fausses » ouvertures AMPP.
Les visualisations ci-dessus indiquent clairement que l’AMPP a introduit un biais important dans la définition des ouvertures d’emails, invalidant ainsi la fiabilité des taux d’ouverture. Dans ce qui suit, nous montrons pourquoi les clics restent une source d’information fiable dans le monde post-AMPP.
Qu’est-il arrivé aux clics ?
Heureusement, l’introduction de l’AMPP n’affecte pas la manière dont les clics sont suivis. Le suivi fonctionne grâce à une balise de suivi qui est encodée de manière unique dans chaque lien envoyé dans un email. Chaque fois qu’un lien est ouvert dans un navigateur, l’expéditeur reçoit une notification lui indiquant qu’un clic s’est produit et peut identifier l’email envoyé qui contenait ce lien. Par conséquent, étant donné que les clics ne dépendent pas du pixel espion, le préchargement n’aura aucune incidence sur l’identification des clics. Cette quasi-immunité face aux pratiques actuelles en matière de confidentialité pourrait donner aux clics une longueur d’avance sur les ouvertures.
Si les clics ne sont pas affectés par l’AMPP, cela signifie que la distribution des clients email et les taux de clics seront stables entre la période pré et post-AMPP. C’est exactement ce que l’on peut voir dans la figure 4 qui montre comment la distribution des clics par clients email a évolué dans le temps entre le 1er août et le 28 février. La part des appareils Apple (somme des zones verte et jaune) est globalement stable, à environ 40 %.
La figure 5 reproduit l’analyse effectuée pour les taux d’ouverture en se concentrant sur les clics. Cette comparaison renforce le message selon lequel les taux de clics sont stables dans le temps. D’une part, les taux de clics des contacts AMPP n’ont pas changé avant et après l’introduction. D’autre part, il n’y a pas non plus de changement visible dans les taux de clics entre les utilisateurs de l’AMPP et les non utilisateurs de l’AMPP. C’est un résultat rassurant qui porte à croire que les clics ne sont pas affectés par l’AMPP et qu’ils pourraient être un indicateur plus approprié pour quantifier les niveaux d’engagement, et ce même pour les utilisateurs de l’AMPP.
Conclusion
Apple a changé le monde des marketeurs en introduisant sa nouvelle fonctionnalité de confidentialité, la protection de la confidentialité dans Mail, qui empêche les expéditeurs de collecter des informations sur les ouvertures d’emails.
Notre analyse indique clairement qu’il est impossible de passer à côté de l’AMPP. Toutefois, les clics ne semblent pas avoir été affectés jusqu’à présent, ce qui accroît leur importance dans toute campagne ou produit marketing.
À l’avenir, nous partagerons plus d’informations sur l’impact que l’AMPP a eu sur notre plateforme. Restez à l’affût !